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Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/176

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Je veux vous retirer de votre aveuglement.
Cette fille…

Léandre

------ Poursuis.

Mascarille

---------------- N’est rien moins qu’inhumaine :
Dans le particulier elle oblige sans peine,
Et son cœur, croyez-moi, n’est point roche, après tout,
À quiconque la sait prendre par le bon bout ;
Elle fait la sucrée, et veut passer pour prude ;
Mais je puis en parler avecque certitude.
Vous savez que je suis quelque peu d’un métier
À me devoir connaître en un pareil gibier.

Léandre

Célie…

Mascarille

-----Oui, sa pudeur n’est que franche grimace,
Qu’une ombre de vertu qui garde mal sa place,
Et qui s’évanouit, comme l’on peut savoir,
Aux rayons du soleil qu’une bourse fait voir.

Léandre

Las ! que dis-tu ? Croirai-je un discours de la sorte ?

Mascarille

Monsieur, les volontés sont libres : que m’importe ?
Non, ne me croyez pas, suivez votre dessein,
Prenez cette matoise, et lui donnez la main ;
Toute la ville en corps reconnaîtra ce zèle,
Et vous épouserez le bien public en elle.

Léandre

Quelle surprise étrange !

Mascarille, à part.

---------------- Il a pris l’hameçon,
Courage ! s’il s’y peut enferrer tout de bon,
Nous nous ôtons du pied une fâcheuse épine.

Léandre

Oui, d’un coup étonnant ce discours m’assassine.