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Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/260

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Albert

J’en rends grâces au ciel.

Polydore

Il ne vous faut rien feindre :
Votre ressentiment me donnoit lieu de craindre ;
Et Lucile tombée en faute avec mon fils,
Comme on vous voit puissant et de biens et d’amis…

Albert

Heu ! Que parlez-vous là de faute et de Lucile ?

Polydore

Soit, ne commençons point un discours inutile.
Je veux bien que mon fils y trempe grandement ;
Même, si cela fait à votre allégement,
J’avouerai qu’à lui seul en est toute la faute ;
Que votre fille avoit une vertu trop haute
Pour avoir jamais fait ce pas contre l’honneur,
Sans l’incitation d’un méchant suborneur ;
Que le traître a séduit sa pudeur innocente,
Et de votre conduite ainsi détruit l’attente.
Puisque la chose est faite, et que selon mes vœux
Un esprit de douceur nous met d’accord tous deux,
Ne ramentevons rien, et réparons l’offense
Par la solennité d’une heureuse alliance.

Albert

Oh ! Dieu ! Quelle méprise ! Et qu’est-ce qu’il m’apprend ?
Je rentre ici d’un trouble en un autre aussi grand.
Dans ces divers transports je ne sais que répondre ;
Et si je dis un mot, j’ai peur de me confondre.

Polydore

À quoi pensez-vous là, seigneur Albert ?

Albert

À rien.
Remettons, je vous prie, à tantôt l’entretien :
Un mal subit me prend, qui veut que je vous laisse.




Scène III, 5



Polydore

Je lis dedans son âme et vois ce qui le presse.
À quoi que sa raison l’eût déjà disposé,