Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/263

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Mascarille

Ha ! Monsieur, qu’est-ce ci ? Je défends la surprise.

Valère

C’est la fidélité que tu m’avois promise ?
Sans ma feinte, jamais tu n’eusses avoué
Le trait que j’ai bien cru que tu m’avois joué.
Traître, de qui la langue à causer trop habile
D’un père contre moi vient d’échauffer la bile,
Qui me perds tout à fait, il faut, sans discourir,
Que tu meures.

Mascarille

Tout beau : mon âme, pour mourir,
N’est pas en bon état. Daignez, je vous conjure,
Attendre le succès qu’aura cette aventure.
J’ai de fortes raisons qui m’ont fait révéler
Un hymen que vous-même aviez peine à celer :
C’étoit un coup d’état, et vous verrez l’issue
Condamner la fureur que vous avez conçue.
De quoi vous fâchez-vous ? Pourvu que vos souhaits
Se trouvent par mes soins pleinement satisfaits,
Et voyent mettre à fin la contrainte où vous êtes ?

Valère

Et si tous ces discours ne sont que des sornettes ?

Mascarille

Toujours serez-vous lors à temps pour me tuer.
Mais enfin mes projets pourront s’effectuer :
Dieu fera pour les siens ; et content dans la suite,
Vous me remercierez de ma rare conduite.

Valère

Nous verrons. Mais Lucile…

Mascarille

Alte ! Son père sort.




Scène III, 8



Albert

Plus je reviens du trouble où j’ai donné d’abord,
Plus je me sens piqué de ce discours étrange,
Sur qui ma peur prenoit un si dangereux change ;
Car Lucile soutient que c’est une chanson,
Et m’a parlé d’un air à m’ôter tout soupçon.
Ha ! Monsieur, est-ce vous, de qui l’audace insigne