Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/267

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Se pouvoit emporter à quelque violence,
Je vous apprendrois bien à me traiter ainsi.

Valère

C’en est fait, son courroux ne peut être adouci.

Mascarille

Laissez-moi lui parler. Eh ! Madame, de grâce,
À quoi bon maintenant toute cette grimace ?
Quelle est votre pensée ? Et quel bourru transport
Contre vos propres vœux vous fait roidir si fort ?
Si monsieur votre père étoit homme farouche,
Passe ; mais il permet que la raison le touche,
Et lui-même m’a dit qu’une confession
Vous va tout obtenir de son affection.
Vous sentez, je crois bien, quelque petite honte
À faire un libre aveu de l’amour qui vous dompte ;
Mais s’il vous a fait perdre un peu de liberté,
Par un bon mariage on voit tout rajusté ;
Et quoi que l’on reproche au feu qui vous consomme,
Le mal n’est pas si grand, que de tuer un homme.
On sait que la chair est fragile quelquefois,
Et qu’une fille enfin n’est ni caillou ni bois.
Vous n’avez pas été sans doute la première,
Et vous ne serez pas, que je crois, la dernière.

Lucile

Quoi ? Vous pouvez ouïr ces discours effrontés,
Et vous ne dites mot à ces indignités ?

Albert

Que veux-tu que je die ? Une telle aventure
Me met tout hors de moi.

Mascarille

Madame, je vous jure
Que déjà vous devriez avoir tout confessé.

Lucile

Et quoi donc confesser ?

Mascarille

Quoi ? Ce qui s’est passé
Entre mon maître et vous : la belle raillerie !