Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/281

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Moi, j’aurois de l’amour pour ta chienne de face ?
Moi, je te chercherois ? Ma foi, l’on t’en fricasse
Des filles comme nous !

Gros-René

Oui ? Tu le prends par là ?
Tiens, tiens, sans y chercher tant de façon, voilà
Ton beau galand de neige, avec ta nompareille :
Il n’aura plus l’honneur d’être sur mon oreille.

Marinette

Et toi, pour te montrer que tu m’es à mépris,
Voilà ton demi-cent d’épingles de Paris,
Que tu me donnas hier avec tant de fanfare.

Gros-René

Tiens encor ton couteau ; la pièce est riche et rare :
Il te coûta six blancs lorsque tu m’en fis don.

Marinette

Tiens tes ciseaux, avec ta chaîne de laiton.

Gros-René

J’oubliois d’avant-hier ton morceau de fromage :
Tiens. Je voudrois pouvoir rejeter le potage
Que tu me fis manger, pour n’avoir rien à toi.

Marinette

Je n’ai point maintenant de tes lettres sur moi ;
Mais j’en ferai du feu jusques à la dernière.

Gros-René

Et des tiennes tu sais ce que j’en saurai faire ?

Marinette

Prends garde à ne venir jamais me reprier.

Gros-René

Pour couper tout chemin à nous rapatrier,
Il faut rompre la paille : une paille rompue
Rend, entre gens d’honneur, une affaire conclue.
Ne fais point les doux yeux : je veux être fâché.

Marinette

Ne me lorgne point, toi : j’ai l’esprit trop touché.

Gros-René