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Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/376

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Me donne l’assurance au fort de tant d’assauts,
Que je ne puis trouver dans le peu que je vaux.

Done Elvire
Prince, de vos soupçons la tyrannie est grande
Au moindre mot qu’il dit, un cœur veut qu’on l’entende,
Et n’aime pas ces feux dont l’importunité
Demande qu’on s’explique avec tant de clarté.
Le premier mouvement qui découvre notre âme,
Doit d’un amant discret satisfaire la flamme ;
Et c’est à s’en dédire autoriser nos vœux
Que vouloir plus avant pousser de tels aveux.
Je ne dis point quel choix, s’il m’était volontaire,
Entre Dom Sylve et vous, mon âme pourrait faire ;
Mais vouloir vous contraindre à n’être point jaloux,
Aurait dit quelque chose à tout autre que vous ;
Et je croyais cet ordre un assez doux langage
Pour n’avoir pas besoin d’en dire davantage.
Cependant votre amour n’est pas encor content ;
Il demande un aveu qui soit plus éclatant.
Pour l’ôter de scrupule, il me faut à vous-même,
En des termes exprès, dire que je vous aime ;
Et peut-être qu’encor pour vous en assurer
Vous vous obstineriez à m’en faire jurer.

Dom Garcie
Hé bien, Madame, hé bien, je suis trop téméraire,
De tout ce qui vous plaît, je dois me satisfaire ;
Je ne demande point de plus grande clarté,
Je crois que vous avez pour moi quelque bonté,
Que d’un peu de pitié mon feu vous sollicite,
Et je me vois heureux plus que je ne mérite.
C’en est fait, je renonce à mes soupçons jaloux,
L’arrêt qui les condamne est un arrêt bien doux ;
Et je reçois la loi qu’il daigne me prescrire
Pour affranchir mon cœur de leur injuste empire.

Done Elvire
Vous promettez beaucoup, Prince, et je doute fort,
Si vous pourrez sur vous faire ce grand effort.

Dom Garcie
Ah ! Madame, il suffit, pour me rendre croyable,
Que ce qu’on vous promet doit être inviolable ;
Et que l’heur d’obéir à sa divinité