Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/400

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aux termes ordinaires,
Remettons nos débats après d’autres affaires
Et d’un sang un peu chaud réprimant les bouillons,
N’oublions pas, tous deux, devant qui nous parlons.

Done Elvire
Prince, vous avez tort, et sa visite est telle
Que vous…

Dom Garcie
Que vous… Ah ! c’en est trop que prendre sa querelle,
Madame, et votre esprit devrait feindre un peu mieux,
Lorsqu’il veut ignorer sa venue en ces lieux.
Cette chaleur si prompte à vouloir la défendre
Persuade assez mal qu’elle ait pu vous surprendre.

Done Elvire
Quoi que vous soupçonniez, il m’importe si peu,
Que j’aurais du regret d’en faire un désaveu.

Dom Garcie
Poussez donc jusqu’au bout cet orgueil héroïque,
Et que sans hésiter tout votre cœur s’explique ;
C’est au déguisement donner trop de crédit,
Ne désavouez rien, puisque vous l’avez dit.
Tranchez, tranchez le mot, forcez toute contrainte,
Dites que de ses feux vous ressentez l’atteinte ;
Que pour vous sa présence a des charmes si doux…

Done Elvire
Et si je veux l’aimer, m’en empêcherez-vous ?
Avez-vous sur mon cœur quelque empire à prétendre,
Et pour régler mes vœux, ai-je votre ordre à prendre ?
Sachez que trop d’orgueil a pu vous décevoir,
Si votre cœur sur moi s’est cru quelque pouvoir ;
Et que mes sentiments sont d’une âme trop grande
Pour vouloir les cacher lorsqu’on me les demande :
Je ne vous dirai point si le Comte est aimé,
Mais apprenez de moi qu’il est fort estimé,
Que ses hautes vertus, pour qui je m’intéresse,
Méritent mieux que vous les vœux d’une Princesse,
Que je garde aux ardeurs, aux soins qu’il me fait voir
Tout le ressentiment qu’une âme puisse avoir.