Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/106

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vous. Croyez ce que vous voudrez : il m’importe bien que vous soyez damné !

Don Juan

Mais tout en raisonnant, je crois que nous sommes égarés. Appelle un peu cet homme que voilà là-bas, pour lui demander le chemin.



Scène II

DON JUAN, SGANARELLE, UN PAUVRE[1].
Sganarelle

Holà, ho, l’homme ! ho, mon compère ! ho, l’ami ! un petit mot, s’il vous plaît. Enseignez-nous un peu le chemin qui mène à la ville.

Le Pauvre

Vous n’avez qu’à suivre cette route, messieurs, et détourner à main droite quand vous serez au bout de la forêt ; mais je vous donne avis que vous devez vous tenir sur vos gardes, et que, depuis quelque temps, il y a des voleurs ici autour.

Don Juan

Je te suis bien obligé, mon ami, et je te rends grâce de tout mon cœur.

Le Pauvre

Si vous vouliez me secourir, monsieur, de quelque aumône ?

Don Juan

Ah ! ah ! ton avis est intéressé, à ce que je vois.

Le Pauvre

Je suis un pauvre homme, monsieur, retiré tout seul dans ce bois depuis dix ans, et je ne manquerai pas de prier le ciel qu’il vous donne toute sorte de biens.

Don Juan

Eh ! prie le ciel qu’il te donne un habit, sans te mettre en peine des affaires des autres.

Sganarelle

Vous ne connaissez pas monsieur, bon homme : il ne

  1. Cette scène et la précédente, que l’on croyait perdues, furent publiées pour la première fois en 1813 par M. Simonnin. Il les découvrit toutes deux dans l’édition d’Amsterdam de 1683. Depuis, M. Beuchot a retrouvé les mêmes scènes, mais bien incomplètes, dans un exemplaire de l’édition de 1682, qui avait appartenu a M. de Lomenie, et pour lequel on n’avait point fait de cartons.
    (Aimé Martin.)