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Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/468

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PROLOGUE




Mercure, sur un nuage ; La Nuit, dans un char traîné dans l’air par deux chevaux.

Mercure.

Tout beau ! charmante Nuit, daignez vous arrêter.
Il est certain secours que de vous on désire ;
Et j’ai deux mots à vous dire
De la part de Jupiter.

La Nuit.

Ah ! ah ! c’est vous, seigneur Mercure !
Qui vous eût deviné là dans cette posture ?

Mercure.

Ma foi, me trouvant las, pour ne pouvoir fournir
Aux différents emplois où Jupiter m’engage,
Je me suis doucement assis sur ce nuage,
Pour vous attendre venir.

La Nuit.

Vous vous moquez, Mercure, et vous n’y songez pas ;
Sied-il bien à des dieux de dire qu’ils sont las ?

Mercure.

Les dieux sont-ils de fer ?

La Nuit.

Les Dieux sont-ils de fer ? Non ; mais il faut sans cesse
Garder le décorum de la divinité.
Il est de certains mots dont l’usage rabaisse
Cette sublime qualité,
Et que, pour leur indignité,
Il est bon qu’aux hommes on laisse.

Mercure.

À votre aise vous en parlez ;
Et vous avez, la belle, une chaise roulante
Où, par deux bons chevaux, en dame nonchalante,
Vous vous faites traîner partout où vous voulez.
Mais de moi ce n’est pas de même :
Et je ne puis vouloir, dans mon destin fatal,