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LE BOURGEOIS GENTILHOMME.

LE MAÎTRE À DANSER.

Si je mets sur vous la main…

MONSIEUR JOURDAIN, au maître d’armes.

Tout beau !

LE MAÎTRE D’ARMES.

Je vous étrillerai d’un air…

MONSIEUR JOURDAIN, au maître d’armes.

De grace !

LE MAÎTRE À DANSER.

Je vous rosserai d’une manière…

MONSIEUR JOURDAIN, au maître à danser.

Je vous prie…

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Laissez-nous un peu lui apprendre à parler.

MONSIEUR JOURDAIN, au maître de musique.

Mon Dieu ! arrêtez-vous !


Scène IV.

UN MAÎTRE DE PHILOSOPHIE, MONSIEUR JOURDAIN, LE MAÎTRE DE MUSIQUE, LE MAÎTRE À DANSER, LE MAÎTRE D’ARMES, UN LAQUAIS.
MONSIEUR JOURDAIN.

Holà ! monsieur le philosophe, vous arrivez tout à propos avec votre philosophie. Venez un peu mettre la paix entre ces personnes-ci.

LE MAÎTRE DE PHILOSOPHIE.

Qu’est-ce donc ? qu’y a-t-il, messieurs ?

MONSIEUR JOURDAIN.

Ils se sont mis en colère pour la préférence de leurs professions, jusqu’à se dire des injures, et en vouloir venir aux mains.

LE MAÎTRE DE PHILOSOPHIE.

Hé quoi, messieurs ! faut-il s’emporter de la sorte ? et n’avez-vous point lu le docte traité que Sénèque a composé de la colère ? Y a-t-il rien de plus bas et de plus honteux que cette passion, qui fait d’un homme une bête féroce ? et la raison ne doit-elle pas être maîtresse de tous nos mouvements ?

LE MAÎTRE À DANSER.

Comment, monsieur ! il vient nous dire des injures à tous deux, en méprisant la danse, que j’exerce, et la musique, dont il fait profession.