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LIVRE III, CHAPITRE IX

tantes, les Achéens commettaient un acte coupable : mais dans son impolitique faiblesse de Pliilhellène, il s’en était tenu au blâme, et avait laissé les faits s’accomplir. Ce n’était point assez pour arrêter les fédérés. Poursuivis par leur folle ambition de nains qui veulent se grandir, les Achéens gardèrent la ville de Pleuron en Étolie, où ils étaient entrés pendant la guerre, l’annexèrent en dépit d’elle à la ligue: ils achetèrent Zacynthe à l’agent d’Amynandre, son dernier possesseur, et essayèrent de s'établir aussi à Égine. Mais il fallut, si mécontents qu'ils fussent, rendre les îles à Rome et subir le conseil de Flamininus, leur faisant entendre Les patriotes d'Achaïe qu'ils eussent à se contenter du Péloponnèse. Moins ils étaient leurs maîtres, et plus ils affectaient les grands airs de l’indépendance politique; ils se réclamèrent du droit de la guerre, de la fidèle assistance donnée aux Romains dans tous les combats. « Pourquoi vous occupez-vous de Messène? Est-ce que l’Achaïe s’occupe de Capoue? » L’impertinente question est adressée aux envovés de Rome en pleine diète! Le courageux patriote qui la faisait se voit applaudi à outrance, et pourra compter sur l'unanimité des voix à l’élection prochaine! Rien de plus beau et de plus noble que le courage, quand l’homme et la cause ne sont pas ridicules! Mais quelques sincères efforts que fît Rome pour restaurer la liberté chez les Grecs et mériter leur reconnaissance, elle n'arriva jamais qu'à leur laisser l'anarchie, et qu’à recueillir leur ingratitude. C'était justice autant que male chance. Certes, dans la haine des Grecs contre tout protectorat, il y avait bien au fond quelques nobles sentiments; et la bravoure personnelle ne faisait point défaut à certains hommes donnant le ton a l’opinion. Il n’importe! Tous ces grands airs patriotiques des Achéens ne sont que sottise ou grimace devant l’histoire. Au milieu des élans de leur ambition et de leur susceptibilité nationale,