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livre iii, chapitre ii


252-247 av. J.-C.maines, tellement que les rôles civiques, de 502 à 507, avaient décru de quarante mille têtes ou d’un sixième; sans compter les pertes énormes des alliés, sur lesquels portait tout le poids de la guerre maritime, et qui, au moins autant que les Romains, avaient à défrayer la guerre de terre. Des dépenses d’argent, impossible de s’en faire une idée, elles étaient énormes, soit qu’il s’agit directement de combler les vides de la flotte et du ma­tériel, soit qu’on eût égard aux souffrances du commerce. Le pire mal était qu’on avait épuisé tous les moyens sans pouvoir épuiser la guerre. On avait pratiqué une des­cente en Afrique avec une armée toute neuve, animée par ses premières victoires ; et l’entreprise avait échoué. En Sicile, on avait tenté l’attaque successive des villes : les places moindres étaient tombées, mais les deux puis­santes citadelles de Lilybée et de Drépana restaient de­bout. Que faire désormais? Le découragement prit le dessus. Les pères-conscrits désespéraient de la guerre; ils laissèrent aller les choses : non qu’ils ne sussent fort bien qu’une guerre se traînant sans but et sans terme serait cent fois plus désastreuse pour l’Italie que de nou­veaux et opiniâtres efforts, lui dussent-ils demander et son dernier homme et son dernier écu. Ils n’osèrent avoir foi ni dans le peuple ni dans la fortune, et à tant de sacrifices dépensés en vain, ajouter encore des sacri­fices immenses ! La flotte est condamnée : on ne fera plus que la guerre de corsaires; on donnera les navires de l’État aux capitaines qui voudront les monter pour leur compte, et aller en course. Quant aux opérations sur terre, elles ne continueront que de nom, puisque aussi bien l’on ne peut faire autrement. Mais on se maintien­dra dans les places conquises; on s’y défendra en cas d’attaque. Tout modeste que fût ce plan, il nécessitait, à défaut de la flotte, une armée nombreuse et de grands frais. Certes, l’heure avait sonné ou jamais, pour Car-