Page:Monge - Coeur magnanime, 1908.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
171
LA RANÇON

Un nouveau flot de sang vint empourprer les lèvres de l’angélique malade. Son regard doux et résigné se fixait avec une tendre pitié sur son père ; mieux que des paroles il lui disait : je vous pardonne…

* * *

Ni les soins maternels de la bonne sœur Thérèse, ni les efforts opiniâtres de la science, stimulée par la charité ; ni la jalouse et paternelle tendresse de Rancurel ne purent rendre à la vie la douce petite Marie-Louise. Son sacrifice était accepté. Elle était assez pure, la sainte enfant, pour que Dieu trouvât une satisfaction suffisante dans ce volontaire holocauste ; en retour Il se réservait d’exaucer les pieux désirs de son humble créature au delà de ce qu’elle avait souhaité.

Un soir que la jeune malade se sentait plus faible que d’ordinaire, comprenant que la mort n’était plus pour elle qu’une question d’instants, elle appela son père qui pleurait silencieusement dans un coin. Rassemblant le peu de force, qui lui restait, elle lui exprima ses dernières volontés. Auparavant, elle voulut le consoler et lui prouver que dans les tristes circonstances, qui venaient si soudainement de bouleverser leur existence, il ne fallait y voir que la volonté de Dieu.

« Mon père — lui dit-elle d’une voix, où passait tout son amour filial — ne vous désolez pas. Je m’en vais vous quitter, mais il le faut pour notre mutuel bonheur. Je meurs parce que Dieu le veut ; ma mort c’est votre vie, la mienne sera la rançon de votre âme. Pour la sauver il n’y avait que le sacrifice, c’est le « moment de l’accomplir. Votre généreuse acceptation