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UNE ÂME DE PRÊTRE

Montmoret récoltait les premiers fruits de ses longues prières et de ses généreuses expiations.

Quelques hommes eurent alors le courage d’abdiquer avec le respect humain. Tout d’abord leur conversion ne se borna qu’à la sanctification des quatre fêtes d’obligation ; heureusement ils ne s’arrêtèrent point à ce premier effort ; l’année suivante ils faisaient leurs pâques et devenaient, pour tout de bon, des catholiques pratiquants.

La moitié du sexe fort de Moustiers-Saint-Louis suivit le bon exemple et l’autre moitié — à l’exception de deux — faisait prévoir un bon retour.

Le saint prêtre jubilait ! Cependant il y avait une ombre dans sa joie : il comptait dans son petit troupeau, qu’il aimait si tendrement, deux brebis rebelles ! Que de larmes et de souffrances elles lui coûtaient…

L’une était l’aubergiste. Isidore Figarol, « l’esprit fort » du village. Il avait voué au digne curé une irrémissible haine, laquelle remontait bien loin, au temps où Figarol et l’Abbé Montmoret étaient ensemble sous les drapeaux.

Un jour le premier avait pris à parti un petit soldat breton, nouvellement arrivé à la caserne et qu’il avait surpris faisant sa prière. Le pauvre malheureux semblait comme écrasé par les moqueries et les éclats de rires que provoquaient les méchants propos de Figarol. Soudain l’insulteur se sentit saisi par deux mains puissantes.

« Demande pardon à cet enfant, misérable — lui dit son agresseur, en le ployant de force sur ses genoux. »

Figarol ne se sentait point de taille à lutter avec l’hercule qui venait de fondre si opinément sur lui : les mus-