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CŒUR MAGNANIME

chée à Rodrigue qu’à la pensée qu’il ne reviendrait pas, son bon vieux cœur en était tout bouleversé.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Depuis deux mois on était sans nouvelles. Le silence de Rodrigue ne s’était jamais autant prolongé ; l’inquiétude commençait à gagner sa famille adoptive.

Un matin qu’Anne-Marie se trouvait encore seule, le courrier apporta une lettre à son adresse, timbrée de France, mais dont l’écriture lui était inconnue. Surprise et troublée, d’une main tremblante elle brise le cachet et court à la signature ; elle lit : Aimé de Montaigu ; l’en-tête portait : grand Séminaire, Montrouge. Elle tressaille… un malheur peut-être ! tout son sang afflue au cœur… elle se sent défaillir… Ce ne fut qu’un éclair, sa vaillance triompha bien vite. Elle se recueillit un instant comme pour demander à Dieu le courage nécessaire, puis, intérieurement réconfortée elle lut :

« Je ne suis pas un étranger pour vous, Mademoiselle, car votre frère, je le sais, vous a quelquefois parlé de son camarade d’études Aimé de Montaigu. Naguère encore étudiant en médecine, comme lui, je suis à cette heure élève au grand Séminaire, où je me prépare à la prêtrise.

Confident intime de Rodrigue je suis, à ce titre, chargé auprès de vous d’une mission bien pénible. Je connaissais, depuis longtemps, quel doux lien vous unissait à lui ; et me voilà contraint aujourd’hui de vous apprendre qu’il est rompu… Il m’a fallu faire appel à tout mon courage pour me charger de cette mission ; je sais