Page:Monod - Renan, Taine, Michelet, 1894.djvu/329

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

arrivé à se faire une règle de vie austère fondée sur le sentiment seul, je pourrais presque dire sur le culte même qu’il avait pour l’amour. Il a d’autant plus de mérite à s’être élevé à cette conception morale si élevée qu’il avait accepté et lâcher pour autrui la théorie commode qui déclare impossible dans le célibat l’observation stricte de la règle des mœurs. Mais ce n’est là qu’un des côtés de sa discipline. C’est à tous les moments de la vie qu’il s’observe, travaille sur lui-même, s’adresse des réprimandes et des conseils, tend sans cesse à la perfection morale. Il se reproche les impatiences et les bouillonnements de son sang ardennais ; il se promet de ne plus discuter avec violence. Il note chaque petit progrès ; il éprouve une joie enfantine à constater « qu’il se lève de bonne heure sans grogner ».

Il continue son journal après la mort de Poinsot « pour s’améliorer ». Il va au Père-Lachaise sur la tombe de son ami « pour se rendre meilleur » ; il s’accuse de « son manque de discipline ». Il cherche dans l’exercice de la charité l’éducation de son âme et la distraction à sa tristesse. Il en arrive à formuler des préceptes d’une rigueur monacale. « Retranchons des paroles tout ce qui est personnel.