Page:Monod - Renan, Taine, Michelet, 1894.djvu/57

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de mourir sans souffrances physiques et sans affaiblissement intellectuel. Il eut le bonheur de conserver jusqu’au bout toutes ses facultés ; mais les souffrances ne lui furent pas épargnées. Il les redoutait d’avance comme déprimantes et dégradantes ; il ne se laissa ni déprimer ni dégrader par elles. Depuis le mois de janvier, il se savait perdu ; il le disait à ses amis et ne demandait que le temps et les forces nécessaires pour achever son cours et ses travaux commencés. Il voulut aller encore une fois voir sa chère Bretagne ; sentant son état s’aggraver, il tint à revenir à Paris à la fin de septembre, pour mourir à son poste, dans ce Collège de France dont il était administrateur. C’est là qu’il expira le 2 octobre. Pendant ces huit mois, il fut en proie à des douleurs incessantes, qui parfois lui ôtaient la possibilité même de parler ; il resta cependant doux et tendre envers tous ceux qui l’approchaient, les encourageant et se disant heureux. Il leur répétait que la mort n’est rien, qu’elle n’est qu’une apparence, qu’elle ne l’effrayait pas. Le jour même de sa mort, il trouvait encore la force de dicter une page sur l’architecture arabe. Il se félicitait d’avoir atteint sa soixante-dixième année, la vie normale de l’homme