Page:Monselet - Charles Monselet, sa vie, son œuvre, 1892.djvu/20

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prit de Monselet est aussi piquant, et il est moins méchant.

Le lettré, on va le retrouver dans le présent volume, mais on y va rencontrer aussi un Monselet inattendu, qui tient plus du Père de Famille de Diderot que de la Vie de Bohème de Mûrger, quoiqu’il ait fréquenté, aimé et chanté Schaunard.

Oui, il y avait, chez Charles Monselet, un homme simple, exquis et bon, une sorte de Sterne familial, j’appuie sur le mot, qu’on va découvrir dans le livre que voici. M. André Monselet, fin lettré lui-même, esprit juste, pénétrant, attendri, tout dévoué — on le comprend de reste — à la chère mémoire de son père, nous donne aujourd’hui, dans son intéressant volume, un délicieux Journal de la jeunesse de Monselet et des lettres tout à fait remarquables, pénétrantes et émues, de la vieillesse de l’écrivain. La vieillesse de Monselet ! Voilà un mot que j’aurais grande envie de raturer. On peut dire que Charles Monselet vécut et mourut jeune. La maladie ne lui avait rien enlevé de sa vive et la dernière fois que je le vis, au coin de l’avenue Frochot, très souffrant, amaigri, il me dit aussi gaiement qu’autrefois, en ses années rieuses :

— Ah çà ! mais ils « persistent », les lecteurs officiels de la Comédie-Française ? Je le l’avoue, je guignais une de leurs places et — quelle ironie ! — c’est la mort qui me guette, moi ! Je disparaîtrai sans avoir eu ce que ma gourmandise a toujours souhaité : un petit coin dans un fromage de Hollande, comme le rat du bon La Fontaine. Adieu, cher ami !

Il me serra la main, descendit lentement — très lentement, hélas ! — la rue de Bréda, et disparut au loin. Je ne l’ai plus revu.

Mais tel il était là, tel on le retrouvera dans les Notes où,