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XII

Il est un livre d’Arnould Frémy — la Révolution du journalisme — qui, pour dater de 1865, n’en est pas moins, aujourd’hui plus que jamais, d’une remarquable actualité.

Voici ce qu’on y rencontre, par exemple, page 253 :

« … Ô vous qui lisez les journaux chaque matin, qui y trouvez pour vos habitudes et votre esprit un élément quotidien dont vous ne sauriez plus, de votre propre aveu, vous passer, apprenez une chose qui va sans doute bien vous étonner et aussi vous chagriner un peu, nous l’espérons du moins : c’est qu’à fort peu d’exceptions près, les journaux ne nourrissent pas les hommes qui les font.

» C’est bien le plus beau métier de meurt-de-faim que la muse de l’imprévoyance et de la déception ait jamais inventé pour peupler un certain coin du monde civilisé de victimes déguisées, du reste, et qui ont bien soin, — on ne peut trop insister sur ce détail, — de ne jamais laisser percer leurs déceptions ni leurs amertumes… »


À rapprocher de ces lignes d’Arnould Frémy la confession suivante de M. Joseph Montet — universitaire lui aussi — dans le journal la Paix du 23 mai 1888 :

« … Il y a sur le rendement du travail littéraire une légende Qatteuse, mais erronée, qu’il faut détruire. Le public s’imagine volontiers que les écrivains sont des paresseux privilégiés, à qui il suffit de fumer quelques cigarettes entre une main de papier et une écritoire pour gagner de l’argent gros