pour ces vieux travailleurs de la pensée, blanchis sous le harnais et qui ont bien droit à une vieillesse tranquille pour tous les efforts, pour le labeur incessant de leur jeunesse et de leur âge mûr. Croit-on que Monselet n’aurait pas été aussi bon bibliothécaire qu’un autre ? — Hélas ! il se produisait bien, de temps à autre, des vacances, mais chaque fois il y avait quelque danseur à caser. » (Emmanuel Arène, la République française, no du 20 mai 1888.)
Voici encore une digression — nécessaire cependant — à laquelle je me suis laissé entraîner et qui m’a éloigné une fois de plus de mon modèle : j’y reviens en hâte.
L’imprimerie Vallée, située 15, rue Bréda, où s’imprimait, entre autres journaux, le Monde illustré, avait, à l’époque, donné quelque mouvement à ce quartier, qui possédait déjà une physionomie toute particulière empruntée aux artistes et à la jeunesse qui l’habitaient.
La brasserie des Martyrs, le café de La Rochefoucauld, le café Jean Goujon étaient autant de rendez-vous du Tout-Paris littéraire ; j’entends par là une génération nouvelle de jeunes talents. Le café avait gardé de son influence : les aînés y allaient par habitude et les jeunes par religion.
De cette époque date aussi la célébrité de Dinochau. Ce cabaretier, fameux pour avoir traité dans une salle de six pieds carrés tout ce que la littérature, le pinceau ou le théâtre comptait alors de pratiquants, — déployait son enseigne au coin de la rue de Navarin et de la rue Bréda, — vis-à-vis l’imprimerie. Monselet y était entré un jour après avoir corrigé les épreuves d’un de ses articles, à la suite de Nadar et de Mürger : on les suivit, on y revint, bientôt on y accourut. Notre écrivain — en passe de célébrité — semblait tout désigné pour devenir l’idole de ce nouveau temple-bar : sa divinité trouva en effet, dans cet Olympe du mouillage, une