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Page:Monselet - Charles Monselet, sa vie, son œuvre, 1892.djvu/76

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CHARLES MONSELET


Espartero faisait parler de lui en Espagne. L’Afrique perpétuait notre réputation de bravoure. Le ciel, qui bénit les grandes familles, s’appliquait à bénir la famille des Arago. L’opposition était toute-puissante ; on était de l’opposition ou l’on n’était pas de l’opposition, tout était là ; si l’on en était, ou risquait d’aller loin. Chateaubriaud vivait toujours ; on avait même donné son nom à un beefsteack. Des épiciers qui s’appelaient Gratteboullard ou Miton-Mitaine étaient furieux de voir aux affaires M. de Lamartine. Le Figaro d’alors était intitulé le Corsaire-Satan, et, quoique très lu, ne faisait pas ses frais. Une fois par an, à la fête du roi, on distribuait gratuitement des saucissons ; c’était ainsi que l’on comprenait l’amélioration du sort du peuple. Le marché aux comédiens se tenait sous les arbres du Palais-Royal. Les romances de Loïsa Puget résumaient toute la poésie pour une partie de la bourgeoisie de la France. Vidocq avait une agence de renseignements particuliers dans le passage Vivienne. L’éléphant en plâtre de la place de la Bastille tombait en poussière. On vendait du vin à quatre sous dans les cabarets. Le boulevard du Temple battait son plein. À la hauteur de la rue de la Michodière, il y avait des Bains Chinois avec des magots en bois colorié sur des piédestaux. Asnières était presque ignoré. Au coin de la rue Drouot, une enseigne annonçait une table d’hôte tenue par Mlle Thiers, sœur du président du conseil des ministres. Comme il faut à toute époque un refrain populaire en manière de scie, la scie d’alors était les Larifla, et tout le monde chantait sur l’air des Larifla :


Dans la gendarmerie
Quand un gendarme rit,
Tous les gendarmes rient
Dans la gendarmerie ;
Larifla, lia, fia, etc., etc.