aurait peut-être supporté tout cela, car il avait un fonds d’insouciance et un tempérament de lutteur. Mais une fatale nouvelle l’abattit tout d’un coup : il était à la Comédie–Française, le 10 mars 1776, lorsque quelqu’un lui annonça que le garde‑des-sceaux avait décidément supprimé le privilège de l’Année littéraire. Fréron pâlit, puis rougit. La goutte, qui le tourmentait depuis quelque temps, lui remonta au cœur et l’étouffa. Quand sa femme, qui, depuis le matin, implorait dans les antichambres de Versailles pour conjurer la terrible menace, rentra au logis, elle le trouva agonisant.
Fréron avait cinquante-cinq ans alors.
Ainsi mourut, ou plutôt ainsi tomba cet athlète, frappé en plein combat, foudroyé dans toute sa raison et dans toute sa douleur. Vous aurez beau vous récrier, vous les prévenus et les dédaigneux, vous les indifférents et les ignorants, vous n’empêcherez pas que cet homme ne soit un des pères de la critique française, un de vos ancêtres, s’il vous plaît. Il a été et restera