Il se dirigea vers la porte du salon. Elle s’élança vers lui en poussant un cri déchirant.
— Philippe, où allez-vous ?
— Je pars.
— Vous ne m’aimez donc plus ? s’écria-t-elle.
— C’est à vous que je serais en droit d’adresser cette question…
— Vous ne pouvez me quitter de la sorte !
— Il dépend de vous que je reste.
— De moi ! dit-elle en levant les yeux au ciel.
— Ce secret !
— Vous me mépriseriez après que je vous l’aurais dit.
— Alors, adieu !
Sa main n’avait pas quitté la porte. Amélie se posa devant lui.
— En m’abandonnant, dit-elle, vous êtes coupable envers vos devoirs : vous me devez protection.
— Vous me devez confiance.
— Vous trahissez la foi jurée !
— Notre lien établit une communauté absolue de sentiments et de pensées ; qui de vous ou de moi a rompu ce lien ?
— Vous ne partirez pas ! ce n’est pas vrai !
— Vous savez bien que si ! répondit Philippe Beyle, redevenu l’homme impassible et froid des anciens jours.
Elle le regarda et tressaillit.
— Il partirait, oui, il partirait ! murmura-t-elle en se parlant à elle-même.
Alors elle se décida.
— Philippe, ce secret vous concerne.
— Ah ! dit-il avec un soupir d’allégement.
— Ce secret vous concerne plus que moi. Si je le trahis, vous êtes perdu.
Il sourit dédaigneusement.
— Je vous dis que vous êtes perdu, continua Amélie ; et n’en doutez pas ! Vous avez trop appris l’assurance, Philippe ; dans le bonheur, vous avez oublié vos ennemis.
— Des ennemis ?
— Les haines mal écrasées sont les plus terribles.