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petits mémoires littéraires

de ses habitudes de discrétion pour m’écrire la lettre qu’on va lire.

Tout Léon Lava est là, avec ses pudeurs, ses fiertés, sa nature ombrageuse et essentiellement distinguée.

« Monsieur,

» La mesure est délicate entre les remerciements que nous devons à nos juges et la réserve qu’il convient d’observer dans leur propre intérêt, rien n’étant plus dangereux pour la liberté d’un galant homme qu’une main adroitement glissée dans la sienne, à un moment donné. J’avoue que je ne fuirais rien tant que l’apparence d’un aussi plat calcul.

» Toutefois, je ne voudrais pas paraître indifférent aux quelques mots obligeants publiés par vous, à plusieurs reprises, à propos du Duc Job et des Jeunes gens.

» Permettez donc, Monsieur, que je vous en adresse mes remerciements, toute réserve faite pour votre liberté passée et future, et même pour cette pointe de malice qui rehausse d’un sel aimable et courtois les efforts de votre bonne grâce.

» En accusant çà et là, dès votre point de départ, des doctrines littéraires en désaccord avec les miennes, votre critique donne plus de valeur à la sincérité avec laquelle vous recherchez et signalez ce qui, dans mes pièces, peut expliquer et légitimer à vos yeux, dans une certaine mesure, le succès obtenu par des procédés peu conformes aux vôtres. Il y a là, Monsieur, un fait fort à l’honneur de votre caractère et de votre bon sens, et auquel ne peuvent être insensibles ceux qu’en général la presse a peu habitués à de semblables délibérations.

» C’est ce qui m’a mis la main à la plume et m’a