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petits mémoires littéraires

contre parfois un thème ingénieux, comme le Prince indien, comme Mariez-vous, Auguste.

Il faut compter avec ces jolies bluettes. Victor Hugo a dit : « La chanson est une forme ailée et charmante de la pensée ; le couplet est le gracieux frère de la strophe. »

Sainte-Beuve goûtait le talent de Gustave Nadaud. Théophile Gautier, qui ne se plaisait pas pourtant aux concessions, s’est exprimé ainsi sur son compte dans son Rapport sur la Poésie française depuis 1830 :

« Gustave Nadaud a fait une chanson moderne qui reste dans les limites du genre et pourtant contient les qualités nouvelles d’images, de rythme et de style indispensables aujourd’hui… La chanson est une muse bonne fille, qui permet la plaisanterie et laisse un peu chiffonner son fichu, pourvu que la main soit légère ; elle trempe volontiers ses lèvres roses dans le verre du poète où pétille l’écume d’argent du vin de Champagne. À un mot risqué elle répond par un franc éclat de rire, qui montre ses dents blanches et ses gencives vermeilles. Mais sa gaieté n’a rien de malsain, et nos aïeux la faisaient patriarcalement asseoir sur leurs genoux. »

On sait que Gustave Nadaud compose lui-même la musique de ses couplets et qu’il les chante dans les salons, le cas échéant. Un Pierre Dupont du monde. Sa musique est parfaitement à l’avenant de sa poésie, aussi agréable, aussi facile. Elle a le don de mettre en fureur les compositeurs sérieux, qui lui reprochent de manquer de science.

Nadaud a aujourd’hui une bonne pièce de soixante ans. Il est petit, ramassé ; mais l’allure est celle d’un