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d’usage et les touches indispnsables de modestie : « Je vous remercie, vous, hommes paisibles, heureusement étrangers pour la plupart aux troubles qui nous agitent, d’avoir discerné, au milieu du tumulte des partis, un disciple des lettres, passagèrement enlevé à leur culte, de lui avoir tenu compte d’une jeunesse laborieuse, consacrée à l’étude, et peut-être aussi quelques luttes soutenues pour la cause de la raison et de la vraie liberté. Je vous remercie de m’avoir introduit dans cet asile de la pensée libre et calme. Lorsque de pénibles devoirs me permettront d’y être, ou que la destinée aura reporté sur d’autres têtes le joug qui pèse sur la mienne, je serai heureux de me réunir souvent à des confrères justes, bienveillants, pleins de lumières. »

On sait ce que valent ces affectations de lassitude et ces aspirations vers une condition médiocre et tranquille. M. Thiers y trouve surtout une transition pour retracer l’existence de son prédécesseur, le bonhomme Andrieux. Il vante les charmes de la poésie légère, ce qui n’a rien de choquant ; mais il part de là pour égratigner la littérature romantique, et, sous le couvert de l’auteur des Étourdis, il hasarde quelques allusions, d’ailleurs fort innocentes. « M. Andrieux, dit-il, pardonnait au génie d’être quelquefois barbare, mais non pas de chercher à l’être. Le vrai génie consiste à être tel que la nature vous a fait, c’est-à-dire hardi, incorrect, dans le siècle et la patrie de Shakspeare ; pur, régulier et poli dans le siècle et la patrie de Racine. »

Mais comme s’il craignait d’avoir été trop loin ou de répudier quelques-unes de ses attaches à un parti littéraire déjà installé, il se hâte d’ajouter : « Je ne reproduis qu’en hésilanl ces maximes d’une ortho-