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petits mémoires littéraires

Dans les temps d’anarchie et de lutte où nous sommes,
Il faut violenter les choses et les hommes ;
Le despotisme seul féconde le chaos.
Je veux ! L’enfantement du monde est dans ces mots.
— Et d’ailleurs, le succès a passé la souffrance :
Voyez la royauté, c’est-à-dire la France,
Assise fortement, les deux pieds appuyés
Sur les débris fumants des partis foudroyés !

Cette apologie de la violence ne fut pas du goût de tout le monde, et Diane vécut peu de temps sur l’affiche. M. Émile Augier dut retourner à la comédie ; il fit, toujours pour mademoiselle Rachel, Philiberte ; mais cette fois la grande actrice hésita. Il s’agissait d’un rôle de jeune fille qui se croit laide et qui doute qu’on puisse l’aimer. Mademoiselle Rachel montra peu d’empressement à passer pour laide même à ses seuls yeux. Alors M. Émile Augier porta le rôle à madame Rose Chéri, qui n’y mit pas tant de façons. — Il y a des nuances très délicatement exprimées dans Philiberte, à côté de brutalités inconcevables. La réponse du duc à la marquise de Granchamp, qui vient de lui accorder la main de Philiberte, est assurément d’un goût plus que suspect :

Non pas ; je ne veux pas être pris forcément,
Par ordonnance, enfin comme un médicament.

J’aime mieux sourire de ce vers :

Elle est charmante ! elle est charmante ! elle est charmante !

La Pierre de touche, — cinq actes avec M. Jules Sandeau, — signala la rentrée de M. Émile Augier au Théâtre-Français. Ce fut un échec de plus. Le comédien Got employa vainement toute sa bonne humeur