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petits mémoires littéraires

juste et fin, entrant dans le cercle intime des sensations du foyer, plurent sur-le-champ aux femmes. Encouragé, il élargit son cadre et écrivit un roman en deux volumes : Marianna.

On trouva que cela rimait furieusement avec Indiana. Du moins, c’en était une espèce de contrepartie. Jules Sandeau y exposait, avec les couleurs particulières à son tempérament élégiaque, les inconvénients et les mélancolies de l’adultère. On y voyait une femme exaltée quitter son mari et sa famille pour suivre un amant ; puis, abandonnée par cet amant, en prendre un second et faire souffrir à celui-ci tout ce qu’elle avait souffert par celui-là.

Il y eut des gens pour voir là-dedans plus que ce que l’auteur avait voulu y mettre. Ajoutez les paysages du Berry comme toiles de fond, et vous conviendrez que la curiosité avait quelques motifs d’être en éveil.

Marianna réussit beaucoup. Un feuilleton tout entier des Débats, signé J. J. (et recueilli plus tard dans les six petits volumes des Catacombes), vint consacrer ce succès. « Ce livre — disait le feuilleton en terminant — a été inspiré à son auteur par une de ces douleurs profondes et sincères qui remplacent et au delà l’inspiration la plus puissante. C’est le plus net, le plus chaleureux panégyrique qui se puisse faire du mariage si cruellement attaqué, insulté de nos jours. Lisez donc cette hisloire de Marianna ! L’auteur vous est connu à plus d’un titre : il s’appelle Jules Sandeau. Avec la moitié de son nom a été composé le nom le plus célèbre, le plus mystérieux et le plus terrible de ce temps-ci. »

Le succès de Marianna le tira entièrement de page. De la Revue de Paris, il passa à la Revue des Deux-