est une idole. Prenons donc le mot fragile en bonne part dans ce cas. N’est pas fragile qui veut en littérature ; le contraire se rencontre plus fréquemment. La fragilité, poliment entendue, c’est l’émotion à petites doses, l’esprit suspendu à un fil.
Le succès ne se fit pas attendre ; les Scènes et Comédies furent bientôt sur toutes les tables de salon. Les femmes se déclarèrent pour M. Octave Feuillet. Quelques-unes se chargèrent d’organiser une enquête autour de l’homme ; ce fut un ravissement lorsqu’on sut qu’il n’y avait pas à redouter de désillusion, et que le jeune pensionnaire de la Revue des Deux-Mondes ne démentait pas l’idée que ses œuvres donnaient de lui. Voici le résumé des rapports qui furent faits : — Bien de sa personne, mince, de façons distinguées, l’œil doucement voilé sous un pince-nez indispensable, la voix caressante. Ses habitudes étaient non seulement correctes, mais édifiantes ; il vivait autant à Saint-Lô qu’à Paris, par goût ; il fuyait le bruit et l’éclat, une nature de sensitive enfin. La légende allait jusqu’à prétendre qu’il n’avait jamais osé mettre le pied dans un chemin de fer et qu’il s’évanouissait au seul sifflement d’une locomotive.
Sa célébrité toucha de près à la popularité lorsque ses proverbes furent transportés au théâtre. Des régions aristocratiques son œuvre glissa dans les classes bourgeoises, où elle conquit de nouvelles lectrices en nombre considérable. « Faites-nous des romans ! » lui dirent-elles, après que ses proverbes eurent fini de défiler sur les scènes du Gymnase, du Vaudeville et de la Comédie-Française Et M. Octave Feuillet leur fit le Roman d’un Jeune homme pauvre. C’était encore la même chose ou à peu près, un mélange de convention et de réalité ; et justement parce que c’était la même