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petits mémoires littéraires

jusqu’à l’élection de M. Mignet pour se faire une idée d’un semblable « parterre de fleurs ».

Tout à fait à l’aise dans son habit printanier, M. Feuillet prononça un discours que la vérité m’oblige à déclarer d’une extrême faiblesse. Empruntant le plus mauvais style du lieu, il commença par déclarer qu’il fléchissait sous le poids de la couronne qu’il tenait de la bienveillance de ses confrères.

À cet exorde succéda une apologie du roman, morceau sans nouveauté et sans couleur, où il ne se montre occupé qu’à taire des noms. Ensuite vint l’éloge de Scribe, éloge inconsidéré, où les épithètes de rares, d’exquises, d’originales accompagnent l’énumération des qualités du laborieux défunt ; ses vaudevilles sont les perles d’un écrin ; il traite de chefs-d’œuvre les livrets de la Dame blanche et du Chalet.

À l’éloge de Scribe, le nouvel élu ajouta l’éloge du travail sans mesure (qui ne peut être considéré que comme maladie ou comme trafic) et l’éloge de la bourgeoisie. Il alla jusqu’à célébrer son prédécesseur comme conseiller municipal.

Les femmes applaudirent, tant était complet leur aveuglement.

La réponse de M. Vitet, pour valoir un peu plus que le discours de M. Octave Feuillet, ne brilla pas davantage par la légèreté. Il reprit en sous-œuvre, selon l’usage, l’éloge de Scribe et trouva le moyen de surenchérir. Il s’appliqua surtout à excuser le méchant style de l’auteur des Premières amours : « Cette façon d’écrire, dit-il, qui pour la durée de son œuvre ne sera pas, j’en conviens, sans danger (oh ! non !), n’a pas nui, que je sache, à l’étendue de ses succès. Sa renommée cosmopolite n’en a certes pas souffert. À l’étranger surtout, c’est presque un passeport qu’un