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petits mémoires littéraires

comme pas une. Il nous suffira d’en indiquer les points culminants ; ils sont tellement nombreux que nous n’aurons que l’embarras du choix.

Pour commencer, nous trouvons M. Dupanloup, à la date de 1841, en possession d’une chaire d’éloquence sacrée à la Sorbonne, à laquelle ses succès de Notre-Dame comme conférencier en 1834 l’avaient brillamment préparé. On a prétendu qu’en le nommant à ce poste le gouvernement de Juillet avait voulu créer un contre-poids à l’influence des cours de M. Michelet et de M. Edgard Quinet. Je le crois sans peine. On cherchait à utiliser ce zèle impatient et en quête d’une issue. Malheureusement, le contre-poids était d’une lourdeur à ébranler la machine gouvernementale ; on ne fut pas longtemps à s’en apercevoir. Un mot malsonnant sur Voltaire éveilla les susceptibilités de la jeunesse des écoles. — Ah ! ce Voltaire ! c’est le fantôme sans cesse renaissant ! Vous croyez en avoir fini avec lui, et le voilà qui se redresse mieux que jamais. On ne touche pas plus à Voltaire qu’on ne touche à la hache. M. Dupanloup, qui le savait sans doute, mais que le danger eut toujours le don d’exalter, en fit l’expérience à ses dépens.

Le cours d’éloquence sacrée fut suspendu.

Nous touchons au moment caractéristique où allait s’éveiller le polémiste sommeillant sous l’évangéliste. Un projet de loi relatif à l’instruction publique fut l’étincelle qui alluma ce feu. L’abbé Dupanloup adressa à M. de Broglie une lettre, puis une autre, qui émurent vivement le monde religieux et le monde politique. C’en était fait : il avait mordu au fruit de la publicité ; l’arbre tout entier devait être ravagé par lui. — De la brochure au journal, il n’y a qu’un pas ; ce pas fut