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petits mémoires littéraires

me suis arrêté à voir passer ce petit homme à la tête monumentale, ce faible corps sec et droit, que semblait dévorer et faire vivre une flamme intérieure. Il ne regardait personne en marchant ; il était presque toujours seul.

Et Je l’ai plaint, car j’ai senti en lui un malade. Oh ! je l’ai plaint de tout mon cœur !

Mais un malade n’est pas un méconnu.

Le dix-neuvième siècle peut avoir sa conscience en repos au sujet de Berlioz. Il n’est tout au plus coupable que de quelque irrévérence envers les Troyens. II est vrai que cette irrévérence a été profondément sensible au cœur du compositeur. Il n’était qu’aigri, il est devenu farouche.

Voyons, où en serions-nous si les musiciens n’allaient plus pouvoir supporter le pli d’une rose et s’il leur fallait les honneurs divins de leur vivant ?

On veut faire de Berlioz un martyr de l’art.

Un martyr de l’orgueil, à la bonne heure !


FIN