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petits mémoires littéraires

de recommencer, — à son bénéfice, son dernier succès : Un premier jour de bonheur.

Tout était antithèse dans sa vie : il habitait, au No 24 de la rue Saint-Georges, une maison qui avait le triste, le glacial et le sombre d’un tombeau. Le docteur Piogey, qui lui a succédé, en a fait un musée brillant et riant.

Où s’en est allée la fortune considérable d’Auber ? À des parents éloignés et obscurs, m’a-t-on dit. Au moins, Rossini avait fondé une rente pour les vieux musiciens pauvres.


L’œuvre imprimée d’Émile de Girardin est considérable. Rien que les Questions de mon temps représentent un ensemble de douze volumes in-octavo. Mon temps ! le temps d’Émile de Girardin ! La vérité est qu’il a mis de son encre partout, qu’il est intervenu dans une foule de questions et d’événements.

N’a jamais eu, par exemple, le sentiment littéraire qu’à un très mince degré. Et cependant il l’a deviné chez les autres. Tous les hommes de lettres les plus fameux lui ont passé par les mains pendant son directorat de la première Presse. Il est allé chercher (poussé par le sens du succès, et un peu aussi par les conseils de sa femme, Delphine Gay) Balzac, Théophile Gautier, Méry, Eugène Sue, et même je ne dirai pas les petits, mais les demi-aperçus d’alors, tels que Gérard de Nerval, Édouard Ourliac, Marc Fournier, Paul Meurice. Grâce à cet instinct, il a fait du feuilleton de la Presse, pendant une dizaine d’années, — jusqu’en 1848, — un recueil littéraire d’une valeur aussi