ment l’industriel. D’ailleurs je ne te dois rien. En Amérique, j’ai subi tes exigences. Je t’ai mis dans les mains une fortune. Est-ce ma faute si tu n’as point su la garder ?
– Paroles inutiles ! dit Ovide. Tu ne consentiras jamais à laisser dans la misère un proche parent qui t’est si attaché… et qui en sait si long…
– Bref, tu me fais comprendre que je suis à ta merci plus que jamais ! Tu me mets le couteau sur la gorge, comme à New York !
– Chut ! chut ! le vilain mot, cousin, fit Ovide en ricanant.
– Tu te dis : « J’ai son secret. Il tremblera toujours devant moi et la peur lui fera faire ce que je voudrai. »
– Eh ! eh ! il pourrait bien y avoir quelque chose de cela ! Trouverais-tu que je n’ai pas raison ?
– Tu fais de moi la victime d’un chantage odieux.
– Encore des gros mots !… L’air de France te rend grincheux. Tu étais plus gentil que cela, en Amérique.
– Cessons ces plaisanteries idiotes. Je suis moins à ta discrétion que tu ne le crois.
– En vérité, cousin ! et comment cela ?
– Oui, tu peux me perdre d’un mot, mais à quoi ça te servirait-il ? Crois-tu que je subirais, vivant, un scandale ? À la première rumeur, je me ferais sauter la cervelle, et pas un sou de ma fortune ne te reviendrait, car cette fortune appartient tout entière à ma fille. Ton intérêt est donc de me ménager. »
Ovide comprit sans peine que, en poussant Jacques Garaud au désespoir, il risquait de fermer à jamais le coffre-fort où il comptait bien puiser indéfiniment. Donc, il fallait agir par la douceur plus que par la violence. Ovide, en conséquence, reprit mielleusement :
« Mais enfin, voyons, tu as bon cœur… tu es tout à fait incapable de laisser un parent dans la misère.
– Je te mettrai à même de vivre à ton aise.
– Loin de toi ?
– Oui. Nous nous verrons le moins souvent possible.
– Voilà qui n’est pas gracieux… Tu me permettras bien d’aller te serrer la main à ton hôtel de la rue