– Ah ! depuis ce matin, depuis la visite de Melle Harmant, je pressentais quelque malheur. »
Le fils de Jules Labroue regarda Jeanne d’un air effaré.
« Ignorez-vous aussi que Melle Harmant vous aime ?
– Non, je ne l’ignore pas. Mais quel motif l’amenait ?
– Elle venait offrir à Lucie une somme de trois cent mille francs, si elle consentait à s’éloigner de la France.
– Elle a osé proposer à Lucie un semblable marché !…
– Oui. Elle a prié, supplié. Elle s’est mise aux genoux de celle que vous aimez en implorant sa pitié. Lucie s’est révoltée… Alors, Melle Harmant a quitté Lucie en disant qu’elle se vengerait… Que pensez-vous de cette démarche ?
– Je pense qu’il faut pardonner à ceux qu’affole l’amour.
– Ainsi vous ne blâmez point Melle Harmant ?
– Je la plains de toute mon âme, maman Lison.
– Est-ce que Lucie n’est pas à plaindre aussi, elle ? Si vous l’aviez vue, sanglotant, la tête égarée, vous auriez compris qu’elle souffre autant qu’on peut souffrir !
– Je la plains de toute mon âme.
– Ne faites-vous que la plaindre ?… monsieur Lucien… J’ai peur de vous entendre me dire que vous n’aimez plus Lucie, que…
– Et si cela arrivait ? interrompit Lucien.
– Vous en avez donc la pensée ?
– Si je ne devais jamais revoir Lucie ?
– Ah ! vous ne parlez pas sérieusement ! Ne plus revoir Lucie ! Elle en mourrait ! Non, non ! Vous ne ferez pas cela !
– Si l’honneur me forçait à le faire ? S’il existait à cette heure entre nous une barrière infranchissable ?
– C’est impossible, cela ! Ce qui se pouvait hier se peut encore aujourd’hui !
– Des révélations m’ont indiqué mon devoir…
– Allez-vous insulter Lucie en la soupçonnant ?
– La soupçonner ! que Dieu m’en garde !
– Enfin, que vous a-t-on dit ? Qu’ont inventé Paul