Le Messaigier
Pluseurs moult beaux[1] commandemens d’amours.
« Dea[2] Cupido, dis-je, en deux motz lours,
» Où pourrai-je coppier[3] ceste chose? »
— « Regarde Ovide, il te fera secours
» En l’unziesme de son Métamorphose
[4]. »
« — Trop bien cela; mais ne est-il
[5] point notoire
» Qu’il ait esté des gens aucunement
» Soit en cronicque, en rommant[6] ou[7] hystoire
» Qui se soient aimez parfaictement,
» Sans fiction, congneu l’empeschement
» De Fortune, d’Envie et de Discorde? »
— « Tu trouveras à Paris seurement
» Deux vraiz amans : de cela te recorde. »
— « Ha ! Cupido[8], vous me faictes joyeulx;
» Je vous prometz que j’ay fait maint passaige,
» Tant seullement pour veoir deux amoureux
» Qui se aimassent de noble et franc couraige.
» Puis qu’à Paris trouveray personnaige
» Si très loyal, congé je vous requiers ;
» Laisser vous veulx auprès de ce bocaige
[9] ;
» Je vueil cerchier ce que de long temps quiers.
» Depuys le temps que je fuz né sur terre,
» Je ne cessay que mon entendement
» Ne s’enclinast à cercher et enquerre