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fabliau lxxxii

Mis en la terre beneoite.
80— Sa vie soit la maleoite ! »
Fait l’esvesque ; « se ce est voirs,
Honiz soit il et ces avoirs.
Gautier, faites le nos semondre,
Si orrons le prestre respondre
85A ce que Robers li mest seure ;
Et je di, se Deus me secueure[1],
Se c’est voirs, j’en aurai l’amende.
— Je vos otroi que l’en me pande
Se ce n’est voirs que j’ai contei,
90Si ne vos fist onques bontei. »
Il fut semons, li prestres vient,
Venuz est, respondre couvient
A son evesque de cest quas
Dont li prestres doit estre quas :
95« Faux, desleaux, Deu anemis.
Où aveiz vos vostre asne mis ? »
Dist l’esvesques. « Mout aveiz fait
A sainte Esglise grant meffait ;
Onques mais nuns si grant n’oy,
100Qui aveiz vostre asne enfoy
Là où on met gent crestienne.
Par Marie l’Egyptienne,
Cil puet estre choze provée
Ne par la bone gent trovée.
105Je vos ferai metre en prison,
C’onques n’oy teil mesprison. »
Dit li prestres : « Biaus trés dolz sire,

  1. 86 — * secueure; ms., secoure.

    Ce récit, un des plus répandus dans la littérature populaire, doit certainement venir d’Orient, d’où Le Sage l’a fait passer dans son Gil Blas (liv. V, ch. I). Dans ce cas, il s’agit non d’un âne et d’un prêtre, mais d’un chien et d’un cadi. Quant à l’histoire des Mille et une Nuits dont parle Legrand d’Aussy, nous ne la connaissons pas. Les Contes secrets russes (voy. p. 334-335) nous offrent deux versions de ce conte (p. 104, conte 48e) : dans l’une, il s’agit d’un chien, et dans l’autre d’un bouc. Les autres imitations sont du reste nombreuses : Malespini (nov. 59), le Pogge et d’autres encore (Cf. Legrand d’Aussy, III, 107).