le poëte à la cholere, au deuil, a la hayne, et hors de soy, où elles veulent, frappe encore parle poëte, l’acteur, et par l’acteur, consecutiuement tout vn peuple. C’est l’enfileure de noz aiguilles, suspendues l’vne de l’autre. Dés ma première enfance, la poésie a eu cela, de me transpercer et transporter. Mais ce ressentiment bien vif, qui est naturellement en moy, a esté diuersement manié, par diuersité de formes, non tant, plus hautes et plus basses, car c’estoient tousiours des plus hautes en chasque espèce, comme différentes en couleur. Premièrement, vne fluidité gaye et ingénieuse : depuis vne subtilité aiguë et releuee. En fin, vne force meure et constante. L’exemple le dira mieux. Ouide, Lucain, Vergile. Mais voyla nos gens sur la carrière.
dit l’vn :
dit l’autre. Et l’autre, parlant des guerres ciuiles d’entre Cæsar et
Pompeius,
Et le quatriesme sur les louanges de Cœsar :
Et cuncta terrarum subacta,
Præter atrocem animum Catonis.
Et le maistre du cœur, après auoir étalé les noms des plus grands
Romains en sa peinture, finit en cette manière :
CHAPITRE XXXVII.
vand nous rencontrons dans les histoires, qu’Antigonus sçeut
tres-mauuais gré à son fils de luy auoir présenté la teste du
Roy Pyrrhus son ennemy, qui venoit sur l’heure mesme d’estre
tué combatant contre luy : et que l’ayant veuë il se print bien
fort à pleurer : et que le Duc René de Lorraine, pleingnit aussi la
mort du Duc Charles de Bourgoigne, qu’il venoit de deffaire, et en
porta le deuil en son enterrement : et qu’en la bataille d’Auroy
(que le Comte de Montfort gaigna contre Charles de Blois sa partie,
pour le Duché de Bretaigne) le victorieux rencontrant le corps