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Page:Montaigne - Essais, Didot, 1907, tome 3.djvu/152

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Hoc sermone pauent, hoc iram, gaudia, curas,
Hoc cuncta effundunt animi secreta, quid vltrà ?
Concumbunt doctè.

Et alleguent Platon et sainct Thomas, aux choses ausquelles le premier rencontré, seruiroit aussi bien de tesmoing. La doctrine qui ne leur a peu arriuer en l’ame, leur est demeuree en la langue. Si les bien-nees me croient, elles se contenteront de faire valoir leurs propres et naturelles richesses. Elles cachent et couurent leurs beautez, soubs des beautez estrangeres : c’est grande simplesse, d’estouffer sa clarté pour luire d’vne lumiere empruntee. Elles sont enterrees et enseuelies soubs l’art de Capsula totæ. C’est qu’elles ne se cognoissent point assez le monde n’a rien de plus beau : c’est à elles d’honnorer les arts, et de farder le fard. Que leur faut-il, que viure aymees et honnorees ? Elles n’ont, et ne sçauent que trop, pour cela. Il ne faut qu’esueiller vn peu, et reschauffer les facultez qui sont en elles. Quand ie les voy attachees à la rhetorique, à la iudiciaire, à la logique, et semblables drogueries, si vaines et inutiles à leur besoing : i’entre en crainte, que les hommes qui le leur conseillent, le facent pour auoir loy de les regenter soubs ce tiltre. Car quelle autre excuse leur trouuerois-ie ? Baste, qu’elles peuuent sans nous, renger la grace de leurs yeux, à la gayeté, à la seuerité, et à la douceur assaisonner vn nenny, de rudesse, de doubte, et de faueur et qu’elles ne cherchent point d’interprete aux discours qu’on faict pour leur seruice. Auec cette science, elles commandent à baguette, et regentent les regents et l’escole.Si toutesfois il leur fasche de nous ceder en quoy que ce soit, et veulent par curiosité auoir part aux liures : la poësie est vn amusement propre à leur besoin : c’est vn art follastre, et subtil, desguisé, parlier, tout en plaisir, tout en montre, comme elles. Elles tireront aussi diuerses commoditez de l’histoire. En la philo— sophie, de la part qui sert à la vie, elles prendront les discours qui les dressent à iuger de nos humeurs et conditions, à se deffendre de nos trahisons : à regler la temerité de leurs propres desirs à mesnager leur liberté : allonger les plaisirs de la vie, et à porter humainement l’inconstance d’vn seruiteur, la rudesse d’vn mary, et l’importunité des ans, et des rides, et choses semblables. Voyla pour le plus, la part que ie leur assignerois aux sciences.Il y a des