éveillé et le discours plus sain que les autres nations de leur temps, en viennent d’étrenner l’Aretin, auquel, sauf une façon de parler bouffie et bouillonnée de pointes, ingénieuses à la vérité, mais recherchées de loin et fantastiques, et outre l’éloquence enfin, telle qu’elle puisse être, je ne vois pas qu’il y ait rien au-dessus des communs auteurs de son siècle : tant s’en faut qu’il approche de cette divinité ancienne. Et le surnom de grand, nous l’attachons à des princes qui n’ont rien au-dessus de la grandeur populaire.
CHAPITRE XXI.
des prières.
Je propose des fantaisies informes et irrésolues, comme font ceux qui publient des questions douteuses à débattre aux écoles, non pour établir la vérité, mais pour la chercher ; et les soumets au jugement de ceux à qui il touche de régler, non-seulement mes actions et mes écrits, mais encore mes pensées. Également m’en sera acceptable et utile la condamnation comme l’approbation, tenant pour absurde et impie[1] si rien se rencontre, ignoramment ou inadvertamment couché en cette rapsodie, contraire aux saintes résolutions et prescriptions de l’Église catholique, apostolique et romaine, en laquelle je
- ↑ Edition de 1802 : « Tenant pour exécrable, s’il se trouve chose dite par moi, ignoramment ou inadvertamment, contre les saintes prescriptions de l’Église catholique, etc. » — Montaigne fut accusé de son vivant, à cause de ce chapitre, d’être un peu de l’hérésie de Baïus.