Page:Montalembert - Du devoir des catholiques dans la question de la liberté d’enseignement.djvu/19

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ne laisse rien surgir, voilà le foyer où se forme et s’entretient cet esprit public qui en fait de religion n’est rien et ne croit rien. Voilà la source où les générations successives vont boire le poison qui dessèche jusque dans ses racines la disposition naturelle de l’homme à servir Dieu et à l’adorer.

Là s’établit entre les maîtres et les élèves cette intelligence, le plus souvent tacite, mais parfois avouée, qui relègue au rang des préjugés et des conventions sociales toutes les vérités de la révélation. Là s’enseigne, non-seulement dans la chaire, mais dans toutes les habitudes et dans tous les détails de la vie, l’art de mépriser philosophiquement le joug de la loi du Seigneur. Là s’élabore l’idée si répandue parmi nous, que pour être ce qu’on appelle dans le jargon du jour un homme sérieux, un homme pratique, il faut n’être astreint aux observances d’aucun culte. Là se développe cette maladie étrange et monstrueuse de l’esprit qui consiste à adopter comme vraies dans le passé, et pour un temps seulement, les solutions éternelles de la révélation chrétienne, à transformer des obligations de conscience en événements purement historique, et à admettre comme un bienfait social le Christianisme, dont on retranche la divinité du Christ ; comme si le Christianisme ainsi mutilé, loin d’être un bienfait, ne devenait pas la déception la plus scandaleuse et la plus prolongée qui ait jamais été imposée à l’homme.