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Page:Montanclos - Le Fauteuil Comédie en un acte en prose.pdf/11

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ges, les femmes vertueuses la recherchent, et souvent la préfèrent à l’Amour. Elle a l’air moins doux que vous ; mais quand on est parvenu à lui plaire, sa physionomie change, et prend tout-à-coup une très-grande ressemblance avec la vôtre ; ne le voyez-vous pas de même ? — Je suis toujours d’accord avec le Mérite : eh ! comment mes idées ne seroient-elles point les siennes, je lui suis si tendrement attachée ! Jusque-là, Mérite n’avoit pu entrevoir lequel de leurs enfans son épouse chérissoit le plus, et cependant il étoit persuadé qu’elle en aimoit un davantage, même sans le vouloir. Il en reste deux, disoit-il en lui-même : voyons, c’est ici où je dois observer avec le plus de soins. Savez vous que je viens de gronder le Courage, dit Mérite en regardant fixement Amitié. — Le gronder ! eh pourquoi ? — c’est qu’il s’expose à tout, qu’il brave tout, que rien ne peut ni l’effrayer ni l’abattre, et que je crains son caractère tout sublimé qu’il est. Ce fils m’est cher, je tremble chaque jour de le perdre. — Ne craignez rien : Courage n’est point audacieux ; la Prudence hait la Témérité, parce qu’elle émane souvent de l’Orgueil : mais Courage ne tire point vanité de sa force, il n’en fait usage qu’à propos ; et s’il trouve par hasard un vainqueur, c’est alors que sa noble fierté lui devient nécessaire pour l’empêcher de supplier le lâche qui voudroit abuser de sa victoire. Ne changeons rien au caractère de noire fils : puissent les hommes dont il sera l’ami suivre son exemple dans toutes les circonstances de leur vie ! — Je ne lis rien dans les yeux de mon épouse, disoit tout bas le Mérite, me serois-je trompé ? Tout-à-coup il voit accourir vers eux l’Indulgence :