LETTRE XLVIII.
USBEK À RHEDI.
Ceux qui aiment à s’instruire ne sont jamais oisifs. Quoique je ne sois chargé d’aucune affaire importante, je suis cependant dans une occupation continuelle. Je passe ma vie à examiner ; j’écris le soir ce que j’ai remarqué, ce que j’ai vu, ce que j’ai entendu dans la journée ; tout m’intéresse, tout m’étonne ; je suis comme un enfant, dont les organes, encore tendres, sont vivement frappés par les moindres objets.[1]
Tu ne le croirais pas peut-être : nous sommes reçus agréablement dans toutes les compagnies et dans toutes les sociétés. Je crois devoir beaucoup à l’esprit vif et à la gaieté naturelle de Rica, qui fait qu’il recherche tout le monde, et qu’il en est également recherché. Notre air étranger n’offense plus personne ; nous jouissons même de la surprise où l’on est de nous trouver quelque politesse ; car les Français n’imaginent pas que notre climat produise des hommes. Cependant, il faut l’avouer, ils valent la peine qu’on les détrompe.[2]