Je vois que, dans ces moments rigoureux, il y a toujours des mouvements tumultueux, où personne n’est le chef, et que, quand une fois l’autorité violente est méprisée, il n’en reste plus assez à personne pour la faire revenir ;
Que le désespoir même de l’impunité confirme le désordre et le rend plus grand ;
Que dans ces États il ne se forme point de petite révolte ; et qu’il n’y a jamais d’intervalle entre le murmure et la sédition ;
Qu’il ne faut point que les grands événements y soient préparés par de grandes causes : au contraire, le moindre accident produit une grande révolution, souvent aussi imprévue de ceux qui la font que de ceux qui la souffrent.
Lorsque Osman, empereur des Turcs, fut déposé, [1] aucun de ceux qui commirent cet attentat ne songeait à le commettre : ils demandaient seulement, en suppliants, qu’on leur fît justice sur quelque grief : une voix, qu’on n’a jamais connue, sortit de la foule par hasard ; le nom de Mustapha fut prononcé, et soudain Mustapha fut empereur.
De Paris, le 2 de la lune de rébiab 1, 1715.
- ↑ En 1622.