affaires publiques sans la permission des magistrats ; leur art était absolument subordonné à la volonté du sénat ; et cela avait été ainsi ordonné par les livres des pontifes, dont Cicéron nous a conservé quelques fragments[1].
Polybe met la superstition au rang des avantages que le peuple romain avait par-dessus les autres peuples : ce qui paraît ridicule aux sages est nécessaire pour les sots ; et ce peuple, qui se met si facilement en colère, a besoin d’être arrêté par une puissance invincible.
Les augures et les aruspices étaient proprement les grotesques du paganisme[2] ; mais on ne les trouvera point ridicules, si on fait réflexion que, dans une religion toute populaire comme celle-là, rien ne paraissait extravagant : la crédulité du peuple réparait tout chez les Romains : plus une chose était contraire à la raison humaine, plus elle leur paraissait divine. Une vérité simple ne les aurait pas vivement touchés : il leur fallait des sujets d’admiration, il leur fallait des signes de la divinité ; et ils ne les trouvaient que dans le merveilleux et le ridicule.
C’était à la vérité une chose très-extravagante de faire dépendre le salut de la république de l’appétit sacré d’un poulet et de la disposition des entrailles des victimes ; mais ceux qui introduisirent ces cérémonies en connaissaient bien le fort et le faible, et ce ne fut que par de
- ↑ De leg., lib. II, p. 441, t. IV, éd. de Denis Godefroy, 1587 : Bella disceptanto : prodigia, portenta. ad Etruscos et aruspices, si senatus jusserit, deferunto. Et même livre, p. 440 : Sacerdotum duo genera sunto : unum, quod prœsit cœrimoniis et sacris ; alterum, quod interpretetur fatidicorum et vatum effata incognita, cum senatus populusque adsciverit. (M.)
- ↑ L’idée qu’on peut trouver un signe de la volonté des dieux dans le vol des oiseaux ou dans les entrailles des animaux a été, comme l’astrologie judiciaire, une des faiblesses de l’esprit humain. Mais on se trompe du tout au tout en voyant dans cette crédulité une comédie politique.