Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t3.djvu/224

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

CHAPITRE VII.


DU PRINCIPE DE LA MONARCHIE.


Le gouvernement monarchique suppose, comme nous avons dit, des prééminences, des rangs, et même une noblesse d’origine. La nature de l'honneur est de demander des préférences et des distinctions ; il est donc, par la chose même, placé dans ce gouvernement.

L’ambition est pernicieuse dans une république. Elle a de bons effets dans la monarchie ; elle donne la vie à ce gouvernement ; et on y a cet avantage, qu’elle n’y est pas dangereuse, parce qu’elle y peut être sans cesse réprimée.

Vous diriez qu’il en est comme du système de l’univers, où il y a une force qui éloigne sans cesse du centre tous les corps, et une force de pesanteur qui les y ramène. L’honneur fait mouvoir toutes les parties du corps politique ; il les lie par son action même ; et il se trouve que chacun va au bien commun, croyant aller à ses intérêts particuliers.

Il est vrai que, philosophiquement parlant, c’est un honneur faux qui conduit toutes les parties de l’État ; mais cet honneur faux est aussi utile au public, que le vrai le seroit aux particuliers qui pourroient l’avoir.

Et n’est-ce pas beaucoup d’obliger les hommes à faire toutes les actions difficiles, et qui demandent de la force, sans autre récompense que le bruit de ces actions ?

_______________