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CHAPITRE IX.


COMMENT LES BIENS ECCLÉSIASTIQUES
FURENT CONVERTIS EN FIEFS.


Les biens fiscaux n’auroient dû avoir d’autre destination que de servir aux dons que les rois pouvoient faire pour inviter les Francs à de nouvelles entreprises, lesquelles augmentaient d’un autre côté les biens fiscaux ; et cela étoit, comme j’ai dit, l’esprit de la nation ; mais les dons prirent un autre cours. Nous avons un discours de Chilpéric, petit-fils de Clovis, qui se plaignoit déjà que ses biens avoient été presque tous donnés aux églises [1]. « Notre fisc est devenu pauvre, disoit-il ; nos richesses ont été transportées aux églises [2]. Il n’y a plus que les évêques qui régnent ; ils sont dans la grandeur, et nous n’y sommes plus. »

Cela fit que les maires, qui n’osoient attaquer les seigneurs, dépouillèrent les églises : et une des raisons qu’allégua Pépin pour entrer en Neustrie, fut qu’il y avoit été invité par les ecclésiastiques, pour arrêter les entreprises des rois, c’est-à-dire des maires, qui privoient l’Église de tous ses biens [3].

  1. Dans Grégoire de Tours, liv. VI, ch. XLVI. (M.)
  2. Cela fit qu’il annula les testaments faits en faveur des églises, et même les dons faits par son père : Gontran les rétablit, et fit même de nouveaux dons. Grégoire de Tours, liv. VII, ch. VII. (M.)
  3. Voyez les Annales de Metz sur l’an 687. Excitor imprimis querelis