Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t6.djvu/69

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CHAPITRE XX.


LOUIS LE DÉBONNAIRE[1].


Auguste, étant en Égypte, fit ouvrir le tombeau d’Alexandre [2]. On lui demanda s’il vouloit qu’on ouvrit ceux des Ptolomées ; il dit qu’il avoit voulu voir le roi, et non pas les morts. Ainsi, dans l’histoire de cette seconde race, on cherche Pépin et Charlemagne [3] ; on voudroit voir les rois, et non pas les morts.

Un prince, jouet de ses passions, et dupe de ses vertus mêmes ; un prince qui ne connut jamais sa force ni sa faiblesse ; qui ne sut se concilier ni la crainte ni l’amour ; qui, avec peu de vices dans le cœur, avoit toutes sortes de défauts dans l’esprit, prit en main les rênes de l’empire que Charlemagne avoit tenues.

Dans le temps que l’univers est en larmes pour la mort de son père ; dans cet instant d’étonnement, où tout le monde demande Charles, et ne le trouve plus ; dans le temps qu’il hâte ses pas pour aller remplir sa place, il envoie devant lui des gens affidés pour arrêter ceux qui avoient contribué au désordre de la conduite de ses sœurs. Cela causa de sanglantes tragédies [4] : c’étoient des imprudences bien précipitées. Il commença à venger les crimes

  1. A.B. intitulent ce chapitre : Successeurs de Charlemagne.
  2. Suétone, Augustus, C. XVIII. Dion, LI, XVI.
  3. A. On cherche toujours Pépin et Charlemagne, etc.
  4. L’auteur incertain de la vie de Louis le Débonnaire, dans le recueil de Duchesne, tome II, p. 295. (M.)