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LETTRES FAMILIÈRES.


le-champ ; mais votre lettre étoit accompagnée d’un livre que je voulois lire ; et il est arrivé que la lettre que je voulois employer à vous remercier sera uniquement employée à vous féliciter. Votre ouvrage m’a continuellement éclairé et m’a continuellement fait plaisir, parce que vous nous menez d’observation en observation. Je suis fâché de ne pouvoir pas vous dire qu’il faut que vous continuiez vos travaux sur les matières de physique, puisque ces mêmes travaux ont affaibli votre vue. Je suis fâché de ne pas savoir quelle espèce de maladie des yeux vous avez,parce que peut-être je vous aurois proposé une eau dont je me sers tous les jours depuis trente ans, tirée des simples, et qui m’a empêché d’être aveugle depuis trente ans. Avant ce temps-là j’avois essaye une multitude innombrable de remèdes ; tout m’avoit été entièrement contraire. Je ne suis pas en état non plus que vous de lire ; il y a dix ans que j’en suis privé à cause d’une cataracte qui m’est survenue sur un œil ; quoi qu’il en soit, je vous aurois envoyé ma recette. Je suis fort touché, monsieur, de votre conformité dont vous me faites l’honneur de me parler ; c’est de vos idées sur le rapport des lois. C’est un champ très vaste. La moisson est ample et n’attend que les ouvriers. J’ai, monsieur, l’honneur d’être, avec les sentiments de la plus parfaite estime , votre très-humble et très-obéissant serviteur.


A Paris, ce 20 février 1754.



    (1720-1793) d’une famille calviniste d’origine française. Quant à l’influence que l'Esprit des Lois exerça sur lui, V. Revue des Deux Mondes du 1er octobre 1855.

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