Page:Montesquieu - Deux opuscules, éd. Montesquieu, 1891.djvu/48

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de la culture de ses Terres. Le Roi d’Espagne qui reçoit de grandes sommes de sa Douane de Cadix n’est à cet égard qu’un Particulier très-riche dans un Etat très-pauvre.

Tout se passe des Etrangers à lui, sans que ses Sujets y prennent presque de part, & est indépendant de la bonne ou de la mauvaise fortune de son Royaume.

Et si quelques Provinces dans la Castille lui donnoient une somme pareille à celle de sa Douane de Cadix, sa puissance seroit beaucoup plus grande, ses richesses ne pourroient être que l’effet de celle du pais, ces Provinces animeroient toutes les autres & elles seroient toutes ensemble plus en état de soutenir les charges respectives.

Le Roi d’Espagne n’a qu’un grand Thresor, mais il auroit un grand Peuple[1].

XVII

Les ennemis d’un grand Prince qui a régné de nos jours l’ont mille fois accusé plutôt sur leurs craintes que sur leurs raisons, d’avoir formé & conduit le projet de la Monarchie universelle. S’il y avoit réussi, rien n’auroit été plus fatal à l’Europe, à ses anciens sujets, à lui, à sa famille. Le Ciel qui connoît les vrais avantages l’a mieux

  1. V. Esprit des Lois, l. XXI, ch. xxii.